Abstract:
Le présent travail traite plusieurs aspects, nous avons opté en premier lieu pour la
réalisation d’une étude in vivo de quelques paramètres bioécologiques de la chenille
processionnaire dans son environnement. Dans l’étude in vitro, nous sommes intéressés, dans
l’ordre, à la morphométrie des manchons, des chrysalides et des imagos avec identification
des sexes des adules papillons de la chenille. De même nous avons procédé à l’identification
des parasites lors des stades chrysalide, imago et ponte. Cette étude a eu lieu dans quatre
stations différentes, deux forêts naturelles et deux reboisements.
La biométrie des nids des chenilles et des manchons varie selon le nombre de chenilles
coexistantes. Les chenilles ainsi que les imagos, positionnent leurs nids et leurs manchons
dans toutes les directions avec des hauteurs variables selon la biomasse et l'ensoleillement de
l’habitat. La biométrie des chenilles, des chrysalides et des adules, montre que les chenilles
femelles sont plus lourdes et plus longues que les mâles. Le parasite le plus identifié aux
stades chenille et chrysalide est Phryxe caudata, quant à Ooencyrtus pityocampae il parasite
les manchons.
Dans le deuxième volet de la thèse, nous avons expérimenté la lutte biologique par
l’utilisation d’extraits de plantes aromatiques (huiles essentielles). Les essais biologiques par
contact de T. vulgaris contre les larves de Thaumetopoea pityocampa ont montré une
corrélation positive in vitro entre les doses utilisées (0,005 à 0,04 ml) et les taux de mortalité
enregistrés (40,97 à 100%), ainsi qu’in vivo entre les doses appliquées (0,1 à 0,5 ml) et les
taux de mortalité oscillant entre 53,85 et 100% au stade L3. En outre, cet effet biocide est
maintenu à un stade larvaire plus avancé (L5) avec des pourcentages de mortalité variant de
36,11 à 100% à des doses de 0,02 à 0,1 ml in vitro et entre 33,96 et 100% de mortalité avec
des doses de 0,3 à 1,2 ml in vivo. Cette efficacité est aussi intéressante pour L. angustifolia au
stade L3 in vitro, avec une moyenne de mortalité qui varie entre 29,86 et 100%, mais avec des
doses plus élevées de 0,01 et 0,05 ml comparativement à T. vulgaris. In vivo, la mortalité
enregistrée est de 73,35% à la dose 1 ml. Au stade L5, L. angustifolia perd significativement
son incidence biocide, notamment in vivo, où le meilleur taux létal enregistré est de 37,08%
avec une dose de 1,5 ml, et in vitro avec 65,97% de mortalité à une dose de 0,12 ml.
Histologiquement, les huiles essentielles ont entraîné une nécrose suivie d’une
dégénération des cellules intestinales des chenilles, ainsi qu’une destruction générale des poils
et du revêtement cutané des larves.
Nous sommes intéressés à l’identification des composés des huiles essentielles des
plantes utilisées par le biais de la technique CG-MS. Les analyses chimiques obtenus par CGMS
des huiles essentielles de T. vulgaris nous ont permis d’identifier 35 composés chimiques,
le carvacrol (71%) étant le composé le plus dominant, alors que pour L. angustifolia, 36
composés sont identifiés avec deux chémiotypes le lynalol (37%) et linalol acétate (25%).
Description:
La chenille processionnaire du pin, fait l’objet de multiples recherches au niveau
national. C’est le principal déprédateur des forêts et reboisement algériens. La difficulté pour
contrôler sa population est exacerbée par la pratique de la monoculture de l’espèce du genre
Pinus en Algérie, de ce fait, la pullulation atteint toutes les plantations du pin d’Alep. Ce
risque a été clairement observé, surtout dans les années 90, au niveau du barrage vert dans le
sud Algérien, où l’état a procédé au traitement par le Bt. Nous constatons actuellement que ce
ravageur ne cesse de s’étendre.
La démarche de notre étude effectuée dans la région d’Ain Defla a été très importante
dans la mesure où elle nous a permis de cueillir des informations sur la bio-écologie et les
facteurs de mortalités de cet insecte et aussi de trouver certains moyens biologiques pour
lutter contre ce ravageur, sachant que le couvert végétal de cette région est dominé
principalement par le Pin d’Alep. Le choix des quatre stations d’études, deux forêts naturelles
et deux reboisées, nous a permis de recueillir des informations intéressantes.
En premier lieu nous avons travaillé sur les caractéristiques des nids d’hivers, leurs
hauteurs moyennes en relation avec la hauteur et la biomasse des arbres hôtes. Ce qui nous a
permis de trouver qu’elles se situent entre 7,05 et 8,02 m (forêt naturelle du mon Doui) et
entre 3,79 et 4,32 m (forêt naturelle de Temoulgha). Par ailleurs, pour les deux stations
reboisées, la hauteur moyenne varie entre 2,56 et 3,44 m (reboisement de Temoulgha) et entre
0,79 et 0,93 m (reboisement de Babor). Quant au nombre moyen de nids d’hivers dénombrés
par arbre est compris entre 1,2 et 1,7 dans la forêt naturelle du mon Doui, entre 2,5 et 2,7 dans
la forêt naturelle de Temoulgha, entre 3,1 et 3,4 dans le reboisement de Temoulgha et entre
3,2 et 3,3 dans le reboisement de Babor.
Nous observons que les stations reboisées sont plus infectées que les stations
naturelles, ce constat est régi par plusieurs facteurs, tels que les prédateurs, qui sont riches
dans les forêts naturelles, la biodiversité des peuplements (plusieurs espèces d’arbres dans les
stations naturelles et une monoculture pour les reboisements). La biométrie des nids de la
chenille processionnaire du pin varie selon le nombre de chenilles par nids. Dans les forêts
naturelles, l’intervalle moyen de la longueur de nids est compris entre 5 et 24 cm, dans les
forêts reboisées, il est se situe entre 9,33 et 12,23 cm. Quant à la largeur, l’intervalle moyen
varie entre 5,92 et 9,38 cm dans les forêts naturelles et entre 6,63 et 7,73 cm dans les forêts
reboisées. Concernant le poids des nids, les résultats recueillis varient entre 56,71 et 95,08 g (min. = 6 g ; max. = 430 g) dans les forêts naturelles et entre 51,97 et 88,1 g (min = 8 g ; max.
= 360 g) dans les reboisements.
Quant au nombre moyen de chenilles par nids dans les deux forêts naturelles du pin
d’Alep est compris entre 70 et 80,84 (min = 09 ; max = 268). Pour les deux reboisements du
pin d’Alep, la moyenne est comprise entre 50,73 et 92,37 (min = 07 ; max = 530). Ces écarts,
importants, observés entre les nids dans les stations d’études, sont probablement liés aux
conditions trophiques et thermiques. Dans les forêts, les basses températures peuvent causer
des perturbations physiologiques chez les larves de l’insecte par interruption de leur
alimentation nocturne.
La dernière phase aérienne est la procession pour l’enfouissement au sol. Nous avons
observé une hétérogénéité pour l’étendu des périodes de processions et pour le premier jour
de descente dans les différents sites prospectés. L’étendue moyenne dans les forêts naturelles
est de 15 à 22 jours. Cependant, nous avons observé une longue période de descente qui
atteint 43 jours dans le reboisement de Babor, ceci peut être expliqué par le voisinage du
barrage d’eau, qui a optimisé l’humidité de ce site. L’étendue de descente dans le reboisement
de Temoulgha est de 18 à 24 jours. Nous n’avons pas observé un grand écart entre les
stations, sauf pour le reboisement de Babor, cité auparavant. Les premières descentes
enregistrées ont débuté pour toutes les stations pratiquement à la mi-mars.
La deuxième partie de cette étude est consacrée, aux relevés d’informations sur les
pontes de la chenille processionnaire. Nous avons commencé cette investigation par la
distribution des manchons de pontes. Les orientations sont pratiquement équilibrées bien que
légèrement dominées par celle de l’Est. Toutes les directions des orientations possibles sont
enregistrées est, ouest, sud, nord et centre. Les papillons femelles des chenilles installent leurs
manchons sur les arbres a de moyennes hauteurs. La hauteur des arbres n’a aucune incidence
majeure sur l’installions des pontes. Il semble que la biomasse des arbres et le vent ont une
influence sur la hauteur des pontes sur les arbres hôtes. Nous avons procédé au
dénombrement des oeufs pour chaque manchon de ponte. Il y a trois catégories d’oeufs, ceux
qui ont éclos, avec des taux compris entre 64,4% et 85,4% dans les forêts naturelles et entre
72,2% et 89,6% dans les reboisements, ceux qui n’arrivent pas à éclosion, avec des taux
compris entre 6,9% et 25,6% dans les forêts naturelles et entre 6,8% et 17,1% dans les
reboisements. La dernière catégorie est celle des oeufs parasités, pour laquelle nous avons
enregistré des taux qui varient entre 5,1% et 9,9% dans les forêts naturelles et entre 3,6% et
10,6% dans les reboisements. Il ressort de ces résultats que le nombre moyen d’oeufs éclos est
pratiquement invariable pour les reboisements et les forêts naturelles, la même remarque s’applique pour les oeufs parasités mais concernant les oeufs qui n’ont pas éclos, les forêts
naturelles comptabilisent des moyennes nettement remarquables.
Les longueurs de pontes relevées dans les forêts naturelles sont légèrement plus
élevées que celles des stations reboisées, les longueurs mesurés sont comprises entre 2,30 et
2,96 cm dans les forêts naturelles et entre 2,29 et 2,77 cm dans les stations reboisées. Les
pontes sont déposées sur deux types de support, les aiguilles et les rameaux d’arbres. Selon
les résultats trouvés les aiguilles sont les plus attractives pour les femelles. L’étude du
matériel biologique indique une dominance totale du parasite oophage Ooencyrtus
pityocampae.
La troisième partie de cette étude est dédiée à l’étude des caractéristiques
morphométries des chenilles, des chrysalides et des adultes. Les longueurs moyennes des
chenilles varient entre 3,38 et 3,42 cm dans les forêts naturelles et entre 3,44 et 3,46 cm dans
les reboisements. Quant au poids moyen relevé est compris entre 0,38 et 0,39 g dans les forêts
naturelles et entre 0,41 et 0,40 g dans les reboisements. Les chenilles femelles sont plus
lourdes et plus grandes que les chenilles mâles. Le conditionnement des chenilles capturées au
moment de la procession nous a renseigné sur le déroulement de la phase épigé, les résultats
trouvés montrent qu’une moyenne de 20% de chenilles n’arrivent pas à se transformer en
chrysalides. L’émergence des imagos a commencé fin août. Nous avons relevé un taux de
papillons femelles légèrement supérieur à celui des mâles qui ont une taille plus faible. Dans
cette phase, nous avons observé que le taux des chrysalides qui n’arrivent pas à terminer leurs
stades phénologiques est supérieur à 40%. Cet échec est peut-être dû à la température,
l’humidité ou à l’entrée en diapause prolongée.
Une attention toute particulière a été consacrée à l’utilisation de moyens de contrôle
biologiques de cet insecte. En premier lieu nous avons évalué l’activité insecticide des huiles
essentielles de deux espèces de plantes aromatiques appartenant à la famille des lamiacées, à
savoir Thymus vulgaris et Lavandula angustifolia, contre les larves du stade L3 et L5 dans le
laboratoire et en pleine nature. Les traitements par contact à base d’huiles essentielles
montrent une activité insecticide très forte au stade L3 et L5 dans les conditions in vitro, elle
atteint 100% pour Thymus vulgaris. Le taux de létalité enregistré grâce aux huiles de
Lavandula angustifolia est aussi de 100% pour le stade L3, mais il est de 66% pour le stade
L5. Pour les essais in vivo, nous avons observé que T. vulgaris est létale à 100% pour les deux
stades L3 et L5. En revanche les huiles essentielles de L. angustifolia tuent 79 % de L3 et
37% seulement de L5.